24h Le Mans
CENTENAIRE DES 24 HEURES - LE MANS, L’EXCEPTION ⎮ Après l’engouement des engagements féminins aux 24 Heures du Mans dans les années 1970 (treize pendant cette période), ceux-ci diminuent dans les années 1980 pour n’atteindre que le nombre de cinq, et six dans les années 1990. Mais trois personnalités, venues de trois continents différents, ont marqué cette période.
Désiré Wilson, Lyn Saint James et Lilian Bryner comptent parmi les figures féminines les plus connues de ces années 1980 et 1990.
Originaire d’Afrique du Sud, Désiré Wilson est la seule femme de l’histoire du sport automobile à avoir remporté une course au volant d’une Formule 1 : en 1980, elle s’impose avec sa Williams sur le circuit de Brands Hatch dans une manche du championnat britannique Aurora AFX, disputé avec des monoplaces antérieures à la saison F1 en cours.
En 1981, elle prend le départ de son Grand Prix national. Hélas, cette épreuve est par la suite considérée comme illégitime par la FISA (Fédération Internationale du Sport Automobile, ancêtre de la FIA), car organisée par la FOCA (association des constructeurs de Formule 1), à cette époque en conflit avec l’instance fédérale.
Outre la F1, Désiré Wilson fait ses armes en endurance et compte trois participations aux 24 Heures du Mans (1982, 1983, 1991). Pour sa première tentative sarthoise en 1982, elle est au volant d’une Grid Plaza S1, mais est contrainte à l’abandon. Sa deuxième participation en 1983 est une réussite : elle se classe septième au volant de la Porsche 956 n°18, associée à Axel Plankenhorn et Jürgen Lässig. Pour son dernier engagement aux 24 Heures du Mans en 1991, elle court aux côtés de deux autres dames bien connues du sport automobile, l’Américaine Lyn Saint James et la Française Cathy Muller. Le trio est au volant d’une Spice FE 90C, mais doit abandonner à la suite d’une sortie de piste.
C’est l’unique participation aux 24 Heures de Cathy Muller, dont la carrière sur circuit dans les années 1980 la mène jusqu’en Formule 3000, antichambre de la Formule 1, puis jusqu’aux Etats-Unis, et la deuxième de Lyn St James.
En 1989 et 1991, les deux participations de Lyn St James au Mans se soldent malheureusement par deux abandons. En 1989, elle devient la première Américaine à participer à la course, et la seule femme pilote à avoir participé aux 24 Heures du Mans et aux 500 miles d’Indianapolis, les deux plus anciennes courses en circuit en termes d’éditions disputées.
La reconnaissance dont bénéficie Lyn St James vient principalement de ses performances aux Etats-Unis, en monoplace CART, Champ Car et IndyCar. En 1992, elle marque l’histoire des 500 Miles d’Indianapolis en devenant la deuxième femme à prendre le départ de la course après Janet Guthrie en 1977, et la première à recevoir le titre honorifique de « Rookie of the year » (meilleure débutante) à l’issue de cette première participation.
Elle prend le départ des 500 Miles d’Indianapolis à six autres reprises et anime régulièrement les pelotons de l’endurance américaine, avec deux victoires de catégorie aux 24 Heures de Daytona et une aux 12 Heures de Sebring. Parallèlement, elle établit plusieurs records de vitesse sur circuit.
Cette belle carrière lui a valu d’être reçue à la Maison Blanche par trois présidents des Etats-Unis : Ronald Reagan, George Bush et Bill Clinton. Lyn St James se consacre aujourd’hui à la promotion de la place des femmes dans le sport automobile, notamment en tant que co-fondatrice de « Women In Motorsport North America ».
La Suisse Lilian Bryner débute tout d’abord sa carrière sportive en équitation et fait partie de l’équipe nationale de concours complet et jumping. Elle s’adonne ensuite au parachutisme et à la plongée sous-marine avant de se prendre de passion pour le sport automobile.
Elle compte à son actif quatre participations aux 24 Heures du Mans, en 1993, 1994, 1995 et 1997. L’édition 1994 la voit signer son meilleur résultat sarthois avec une deuxième place en catégorie GT2 et un top 10 au classement général (9e) sur Porsche Carrera RSR, aux côtés de Renato Federico Mastropietro et Enzo Calderari.
En 2004, Lilian Bryner entre dans l’histoire de l’endurance en devenant la première femme à remporter les 24 Heures de Spa-Francorchamps, sur une Ferrari 550 Maranello. Son palmarès sur courses de 24 heures compte également trois victoires de catégorie consécutives aux 24 Heures de Daytona.
Que cela soit en rallye ou en circuit, les femmes ont prouvé à bien des égards que le sport automobile n’était pas une affaire de genre. Les femmes ont dû et doivent encore se faire leur place dans ce sport en travaillant d’autant plus dur, comme le souligne Lyn St James : « Lorsque vous débutez dans un métier, vous devez redoubler d’efforts face aux vétérans afin qu’ils se montrent plus chaleureux. Et si vous êtes une femme, vous êtes entourée par un plus grand nombre de doutes, de suspicions. C’est toujours le cas aujourd’hui, à un degré moindre, mais tout de même. »
Pour le Centenaire des 24 Heures du Mans, cinq femmes seront au départ (Lilou Wadoux, Doriane Pin, Rahel Frey, Michelle Gatting et Sarah Bovy) et bien d’autres seront actrices dans les coulisses, comme les ingénieurs, mécaniciennes, team manager ou encore photographes, de plus en plus nombreuses dans les paddocks. Pour rappel, depuis la création de la course en 1923, 65 femmes ont participé à la course sarthoise et 46 ont passé au moins une fois la ligne d’arrivée.
PHOTOS : LE MANS (SARTHE, FRANCE), CIRCUIT DES 24 HEURES, 24 HEURES DU MANS 1983-1994 - DE HAUT EN BAS (D.R. / ARCHIVES ACO) : Au volant de ce prototype Spice (n°40), Lyn St James, Cathy Muller et Désiré Wilson ont constitué le seul équipage entièrement féminin au départ en 1991 ; c'est également sur Spice que Lyn St James a disputé ses premières 24 Heures en 1989 ; Désiré Wilson et Lilian Bryner ont signé leur meilleur résultat au Mans sur une Porsche, respectivement sur prototype 956 (n°18) et sur 911 (n°54).
