René Bonnet aux 24 Heures du Mans : petite cylindrée, moteur arrière, grandes performances
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René Bonnet aux 24 Heures du Mans : petite cylindrée, moteur arrière, grandes performances

CENTENAIRE DES 24 HEURES - UNE HISTOIRE D'INNOVATIONS ⎮ Parmi les petites cylindrées qui ont fait l’histoire sarthoise pendant les années 1960, René Bonnet occupe une place à part, en ayant fait triompher dans sa catégorie la première voiture à moteur central arrière vue aux 24 Heures du Mans. Retour sur une performance historique, qui doit également beaucoup à une rivalité avec Charles Deutsch, son ancien associé sous le label DB.

Avant la deuxième guerre mondiale (1938), ces deux personnages charismatiques fondent la marque DB (pour Deutsch et Bonnet) qui jusqu’en 1961 truste les victoires en course dans un classement en particulier, l’indice de performance devenant indice énergétique (grâce à des consommations de 8 litres parfois pour des moteur de 700 cm3). La France manquant sérieusement de moyens à cette époque, Charles Deutsch (polytechnicien et aérodynamicien, entre autres) forme avec René Bonnet (mécanicien hors pair devenu ingénieur) un duo gagnant qui fait retentir maintes fois la Marseillaise sur les circuits.

Initiales DB : du succès à la discorde

Sur les voitures de leur fabrication, tous deux se sont illustrés comme pilotes, avec respectivement sept participations aux 24 Heures du Mans (dont deux victoires de catégorie) pour Bonnet et une pour Deutsch. Hélas en 1962, le divorce entre ces deux fortes personnalités est consommé. Deutsch restant fidèle à Panhard puis à Peugeot à la cessation d’activité de Panhard, tandis que Bonnet fait confiance à Amédée Gordini, spécialiste des mécaniques à base Renault.

Pour 1962, les ex associés sont « en guerre » désormais et les 24 Heures du Mans, terrain de leurs exploits passés, sont suivies de près par les supporters des deux camps. Charles Deutsch a construit quatre coupés à mécanique Panhard (700 cm3) bien profilés, à coques en plastique fabriquées chez Chappe et Gessalin à Brie-Comte-Robert. Trois sont officiellement engagées, la numéro 70 restant en réserve. Elles remplissent leur contrat en remportant l’indice de performance avec Bertaut et Guilhaudin.

Mais René Bonnet amène de son côté dans la Sarthe deux coupés élégants et racés, eux aussi en fibre de verre (544 kgs) et dotés de mécanique Renault Gordini 4 cylindres, sur base R8 destiné aux Floride et Caravelle et culasse double arbre, de 1000 cm3 (996) associés à des boîtes de vitesses Renault dérivées de celle de l’Estafette.  Sur les 18 voitures fabriquées avec un châssis multitubulaire, à quatre roues à suspension indépendante, trois sont préparées pour Le Mans. Deux disputent la course mais une seule rallie l’arrivée (à moins de six kilomètres de la CD !) en 17e position, pilotée par José Rosinski (brillant journaliste en devenir) et Bernard Consten (futur Président de la Fédération Française du Sport Automobile). Bien que privée de deux de ses quatre rapports de boîte pendant la moitié de la course, elle remporte la classe 851 à 1000 cm3.

René Bonnet du moteur arrière à Matra

Chaussée de jantes en alliage de 13 pouces de diamètre, la René Bonnet est performante malgré ses 100 chevaux disponibles, le positionnement du moteur central (en avant de l’axe des roues arrière, une première mondiale à l’époque) permettant de répartir les poids des essieux arrière et avant de façon équilibrée. Le réservoir est positionné à l’avant avec une roue de secours, les vitres latérales sont en perspex et l’immense bulle surplombant le compartiment moteur lui aussi en plastique, tandis que la boîte dans l’axe arrière du moteur sous un plancher permet le cas échéant de positionner une deuxième roue de secours. L’autre René Bonnet engagée dispose d’un « petit » moteur de 700 cm3 mais ne résiste pas à une surchauffe. La voiture victorieuse de sa classe au Mans, n°46, a été retrouvée dans un sous-sol parisien voici trente ans. Restaurée avec soin, elle coule des jours heureux dans le musée des 24 heures du Mans. Elle vient de subir un coup de jeune pour faire quelques tours du circuit cet été.

En 1963, René Bonnet ayant tiré les enseignements de sa course précédente décide d’abandonner l’arrière à pan coupé au profit d’un rallongement substantiel et profilé, justifiant l’appellation Aérodjet. Trois voitures sont alignées avec des fortunes diverses. La première se retourne au passage de la bosse de la courbe Dunlop, sans gravité pour le pilote malgré le manque d’arceau de sécurité à l’époque. Pilotée par Robert Manzon, la deuxième sort de piste dans les Hunaudières sur une nappe d’huile et voit sa coque coupée en deux, mais Manzon en réchappe fort heureusement. Aux mains du futur grand espoir Jean-Pierre Beltoise, la troisième remporte l’indice de performance, non sans avoir terrifié les commissaires du virage de Mulsanne qu’il passait parfois sur deux roues, ce qui fait l’objet d’un rapport circonstancié au Directeur de course.

En 1964, avant la disparition de sa marque rachetée par Matra, René Bonnet fait appel à des châssis poutre animés de moteur Renault Gordini de 1 000 à 1 150 cm3. C’est un échec aux 24 Heures mais la Matra Djet est un beau succès commercial. Un exemplaire est même offert à Youri Gagarine, le premier homme dans l’espace.

PHOTOS : LE MANS (SARTHE, FRANCE), CIRCUIT DES 24 HEURES, 24 HEURES DU MANS - DE HAUT EN BAS (D.R. / ARCHIVES ACO) : En 1962, la René Bonnet en version coupé et spider, avec le premier moteur central (devant l'axe des roues arrière) de l'histoire des 24 Heures, et ci-dessus la Djet de 1964.

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